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INRA
Qualité de l'eau & des écosystèmes aquatiques

Mots clés : grands systèmes, paysages, champs - 3 échelles pour observer et réduire l'impact des activités humaines
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Index du dossier
1. Plongée dans les grands lacs alpins
2. Organisation des paysages et maîtrise des pollutions
3. Vers une utilisation raisonnée des produits phytosanitaires

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Les grands lacs alpins ont connu plusieurs vagues de pollution durant le 20ème siècle ; celle liée aux rejets d’eaux usées contenant du phosphore notamment a été très marquée dans les années 1970-80. Des dispositifs de lutte anti-pollution ont été mis en place et ont permis une amélioration de la qualité de l’eau, sans pour autant toujours aboutir au rétablissement de l’état écologique des lacs d’avant 1950. Des chercheurs de l’INRA, en collaboration avec le CNRS et l'Université de Savoie, ont développé une nouvelle approche qui permet de retracer l’histoire écologique des lacs par l’étude des archives moléculaires de la biodiversité des sédiments et d’envisager ainsi une meilleure gestion à venir de leurs eaux.

INRAimages 1. Dr Ralf Wagner – 2. Martine Le Bec – 3. Cigalette
H2o – février 2012

Plongée dans les grands lacs alpins

 

Le Centre alpin de recherche sur les réseaux trophiques des écosystèmes limniques de Thonon-les-Bains étudie le fonctionnement des écosystèmes aquatiques alpins, lacustres en particulier, les interactions avec les apports des bassins versants.

Les trois plus grands lacs naturels français des Alpes du Nord sont au centre de ces recherches : le lac Léman, le lac du Bourget et le lac d’Annecy. Les chercheurs étudient les réponses de l’écosystème lacustre aux changements de pressions anthropiques et au changement climatique. Ils analysent aussi l’évolution de la qualité des milieux aquatiques (eaux, biodiversité, ressources piscicoles) et l’efficacité des mesures de gestion environnementale.


Le parcours des polluants du bassin versant vers le lac

La qualité de l’eau d’un lac dépend de son bassin versant et des activités humaines, agricoles et industrielles qui s’y développent. Les chercheurs étudient les mécanismes de transfert de divers composés, nutriments, et particules notamment, du bassin versant jusqu’à l’écosystème aquatique. Ces substances agissent sur le fonctionnement et la biodiversité du lac. Elles peuvent infiltrer le réseau trophique et se propager jusqu’aux poissons.

Certains polluants, tel le phosphore, agissent comme des fertilisants et conduisent à l’eutrophisation des lacs : des algues toxiques prolifèrent, moins d’oxygène est disponible dans le fond du lac, la reproduction naturelle de certaines espèces de poissons devient impossible.

D’autres polluants sont toxiques en faibles doses et peuvent transiter dans le réseau trophique : pesticides, PCB, retardateur de flamme, résidus médicamenteux… La présence de ces polluants dans l’eau nécessite la mise en place de traitements coûteux pour l’alimentation en eau potable. Certains poissons peuvent devenir également impropres à la consommation si leur chair est marquée par ces toxines. Enfin, la biodiversité et le fonctionnement du lac peuvent aussi être affectés.


La vie cachée des lacs

Pour étudier la diversité biologique d’un lac, les chercheurs effectuent des prélèvements de microorganismes aquatiques. Leur analyse sert à identifier les liens existants entre organisation des communautés planctoniques, évolution des écosystèmes lacustres et dynamique des peuplements piscicoles.

Les approches d’observation par microscopie ne permettent pas toujours d’analyser finement la diversité biologique. Certains organismes ne sont pas précisément identifiables mais leur ADN atteste de leur présence et de leur identité. L’ADN contenu dans les sédiments donne des indications sur les communautés planctoniques passées et son analyse permet de retracer leur évolution ainsi que l’impact de l’activité humaine et des changements globaux sur l’écosystème lacustre.


Retour vers le futur des lacs

Aucun suivi ni analyse des différents paramètres biologiques et physico-chimiques des lacs alpins ne sont disponibles sur le très long terme. Les sédiments des lacs constituent des systèmes d’archivage des conditions environnementales passées. La paléolimnologie consiste à étudier les informations archivées dans ces sédiments accumulés au fond des lacs (restes fossiles d’algues, d’animaux…), sur des échelles de temps s’étalant de l’année au millénaire. Cette approche permet de comprendre l’évolution des écosystèmes, en évaluant notamment le rôle joué par l’homme, en l’absence de mesures directes et de suivis de terrain. La paléolimnologie permet aussi de contextualiser les données par rapport à des phénomènes globaux, comme les évolutions climatiques.

Traditionnellement, les indicateurs biologiques utilisés dans les approches paléolimnologiques sont fondés sur l’abondance des restes biologiques retrouvés dans les prélèvements de sédiments datés. La possibilité d’utiliser l’ADN comme marqueur de la biodiversité planctonique a été démontrée par une équipe de l’INRA de Thonon dans les sédiments récents (150 ans) des lacs Léman, du Bourget et d'Annecy en 2011. Les chercheurs ont ciblé certains groupes planctoniques, diatomées, cyanobactéries et daphnies, notamment en raison de leur intérêt en tant qu’indicateurs de l’état trophique des milieux, et donc de la qualité des eaux. Ils ont ainsi pu relier les évolutions des teneurs sédimentaires en ADN de ces groupes avec les évolutions des situations écologiques des lacs au cours de ces 150 dernières années et valider la méthodologie. L’histoire de Planktothrix rubescens (cyanobactérie toxique se développant massivement à partir des années 2000) a plus particulièrement été explorée. Les données acquises ont permis de retracer sa présence de manière ancienne (années 1950) dans le Lac du Bourget, mais aussi de constater sa relative disparition au cours des périodes d’eutrophisation (années 1970-90) laissant alors la place à d'autres genres de cyanobactéries tels que Aphanizomenon, Nostoc, et Anabaena. Planktothrix rubescens est donc plus particulièrement présente pour des états trophiques intermédiaires, et son abondance devrait décroître dans les années futures si la restauration du lac lui permet d'atteindre un état oligotrophe, c'est-à-dire pauvre en éléments nutritifs. Les études moléculaires sur les œufs de Daphnies (un micro-crustacé planctonique qui occupe un rôle écologique important dans les lacs) ont montré que l'eutrophisation avait favorisé l'hybridation ainsi que les flux de patrimoine génétique entre les espèces. Ces transferts inter-spécifiques ont irréversiblement modifié l'architecture génétique des Daphnies. Ces résultats soulignent que les écosystèmes naturels et les communautés qu'ils hébergent sont en constante évolution et ne sauraient retourner à leur strict état original. .

 

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ResSources
Centre INRA de Dijon
Unité mixte de recherche INRA-Université de Savoie
Centre alpin de recherche sur les réseaux trophiques des écosystèmes limniques – CARRTEL
Département scientifique Écologie des forêts, prairies et milieux aquatiques
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INRA – L'eau, recherches pour une ressource vitale