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Effluents hospitaliers : le site pilote de Bellecombe-SIPIBEL

Mots clés : Bellecombe, SIPIBEL, GRAIE, centre hospitalier Alpes Léman, Annemasse-Bonneville, Plan national sur les résidus de médicaments, PNRM, effluents hospitaliers
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Dossier de
la rédaction de H2o
  
September 2011

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SITE PILOTE DE BELLECOMBE-SIPIBEL
Caractérisation, traitabilité et impacts des effluents hospitaliers

L’extension de la station d’épuration de Bellecombe (de 16 000 à 32 000 équivalents habitants) en concomitance avec la construction du nouveau centre hospitalier Alpes Léman ont entraîné une modification de l’arrêté préfectoral de rejet au milieu naturel. Cette nouvelle version a permis d’évoquer la problématique de la gestion des effluents hospitaliers en station d’épuration. Le syndicat d’assainissement de Bellecombe a donc rapidement engagé une réflexion sur le sujet et aussi proposé de porter la phase de démarrage d’une étude scientifique.

Syndicat intercommunal de Bellecombe SIPIBEL – GRAIE
H2o – septembre 2011


La volonté de mettre à disposition un site d’expérimentation

Créé en 1974, le Syndicat intercommunal de Bellecombe regroupe 13 communes situées dans la basse vallée de l’Arve, entre Annemasse, Bonneville et La Roche-sur-Foron. Il a pour vocation l’assainissement collectif (collecte et traitement des effluents) et non collectif. La construction de 250 km de réseau permet aujourd’hui à près de 80 % de la population d’être raccordée (taux élevé pour des communes rurales). Très vite conscient de l’excellente opportunité de suivi qu’offrait la séparation des filières d’assainissement des rejets hospitaliers et domestiques, le syndicat de Bellecombe s’est alors activement mobilisé pour fédérer équipes de recherche, partenaires institutionnels et techniques autour du projet SIPIBEL. En effet la configuration actuelle de la station d’épuration de Bellecombe permet de collecter et de traiter les deux types effluents de manières spécifiques. Cette originalité va permettre de réaliser un programme d’étude pour répondre aux interrogations liées à la caractérisation, la traitabilité et aux impacts des effluents hospitaliers.

Il faut aussi souligner que ce projet représente des enjeux importants, tant du point de vue scientifique qu’opérationnel pour les exploitants de station d’épuration. Cette étude d’envergure nationale dépasse ainsi largement les limites du syndicat : c’est pourquoi celui-ci s’appuie sur les compétences du GRAIE (association qui a pour objectif de mettre en relation les collectivités, les scientifiques et les partenaires institutionnels) pour piloter le démarrage du projet.

Un projet en deux temps – Compte tenu de la mise en route du centre hospitalier Alpes Léman (CHAL) en 2012, le comité de pilotage a profité du fait d’avoir une année complète à disposition, pour débuter l’acquisition des données et des connaissances, sur les trois pôles qui constituent le cœur du projet :

  • les effluents hospitaliers (via les rejets de l’hôpital d’Annemasse) ;
  • les effluents urbains "classiques" à la station d’épuration de Bellecombe ;
  • l’eau du milieu récepteur, l’Arve ;

Une fois l’hôpital ouvert au public, une période de trois ans permettra de consolider les données obtenues durant la première phase de l’étude et d’aller plus loin dans leur interprétation. Au final, toutes les analyses et essais de traitement permettront de mieux évaluer la nécessité d’envisager un traitement spécifique des rejets hospitaliers, pour protéger la STEP et minimiser les rejets et les impacts dans le milieu naturel.


SIPIBEL et le SM3A : vers une poursuite de la connaissance de la qualité des eaux de l’Arve

Depuis sa création en 1994, le Syndicat mixte d’aménagement de l’Arve et de ses Abords qui regroupe 40 communes, de Chamonix à la frontière suisse, met en œuvre des actions d’amélioration de la connaissance et de la qualité des eaux de l’Arve.

Dans les années 1980, la situation de l’Arve était très préoccupante vis-à-vis de la pollution domestique et industrielle. C’est ainsi que dans le cadre du contrat de rivière Arve (1995-2006) notamment, l’ensemble des stations d’épuration du fond de vallée a été mis aux normes (près de 93 millions d’euros de travaux sur les STEP), autorisant ainsi l’atteinte des objectifs fixés. La qualité obtenue tant chimique que biologique est bonne même si la garde ne doit pas être baissée. Les résultats restent sur certains paramètres fragiles (hydrobiologie, azote ammoniacal). Concernant la pollution métallique due à la présence de nombreuses entreprises du décolletage, du traitement de surface ou de tribofinition dans la vallée de l’Arve, d’énormes progrès ont été réalisés mais une étude bilan réalisée en 2002 a montré que les objectifs n’étaient pas tous atteints. Chrome, cuivre, nickel restaient présents – certes en moindre quantité –  sur certains secteurs du milieu naturel. Le SM3A, aux côtés de l’agence de l’eau, du SNdéc et des collectivités locales s’est donc engagé dans 4 opérations spécifiques nommées "Arve pure 2012" pour aller plus loin dans le traitement des pollutions au cœur des établissements industriels. Les résultats mesurés sur le milieu naturel en 2010 sont tout-à-fait encourageants.

La démarche d’envergure et novatrice, initiée par le syndicat de Bellecombe, dans le contexte particulièrement propice à l’observation et à l’expérimentation du raccordement de l’hôpital Annemasse-Bonneville sur la station d’épuration de Scientrier, va complètement dans le sens d’une meilleure connaissance de la qualité des eaux de l’Arve. Après avoir résolu les problèmes urgents, de nouveaux enjeux peuvent être appréhendés à travers la recherche de molécules nouvelles tant médicamenteuses que liées aux produits d’entretien hospitaliers. L’étude "état zéro" entamée dès cette année 2011 permettra de connaître la qualité du milieu naturel en amont et en aval de la station d’épuration de Scientrier avant le raccordement de l’hôpital. Les résultats obtenus seront comparés à une prochaine campagne de mesure qui sera réalisée après le raccordement de l’hôpital.

Dans l’avenir, l’impact sur l’Arve du traitement des effluents hospitaliers sera évalué au fur et à mesure que celui-ci sera optimisé.

Cette étude, qui s’étalera sur plusieurs années, est tout à fait fondamentale dans le sens qu’elle comprend le développement de méthodes de recherche nouvelles pour certaines molécules qu’on ne sait pas retrouver dans l’eau aujourd’hui. Elle va aussi dans le sens des analyses menées par la CIPEL (commission internationale pour les eaux du Léman).

Elle est enfin capitale pour que le bassin genevois tant français que suisse puisse continuer à boire une eau de bonne qualité. Rappelons en effet que l’eau potable sur ce territoire provient de la nappe profonde qui est directement et artificiellement réalimentée à partir des eaux de l’Arve à Vessy (Suisse). En effet, lorsque l’eau de l’Arve est polluée, les pompages cessent. Dans les années 1980, environ 800 heures d’arrêt étaient constatés à cause du chrome. Aujourd’hui les heures d’arrêt annuelles sont 100 fois moins nombreuses.

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Une démarche de qualité environnementale et sanitaire en adéquation avec les missions de l'hôpital public

L'inscription du projet  dans une démarche dans une démarche de Qualité Environnementale et Sanitaire – La construction du nouvel hôpital d’Annemasse-Bonneville et l’aménagement de la station d’épuration du syndicat de Bellecombe conçue avec séparation des filières de traitements des effluents urbains et hospitaliers, représentent une opportunité certaine pour l’étude SIPIBEL. L’engagement volontaire du CHAL dans ce projet correspond aux valeurs de Qualité Environnementale et Sanitaire que l’établissement entendait promouvoir  lors de la construction du nouvel hôpital et qui rentre dans un programme plus large de qualité globale et de certification (la recherche de solutions alternatives aux produits d’entretien chimiques, la collecte sélective ou le traitement des effluents spécifiques avant rejet, la préservation des ressources en eau, la maîtrise des consommations énergétiques, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le plan de gestion différenciée des espaces verts, etc.).

Enfin, cette étude marque également une volonté de coopération forte et transparente avec le syndicat de Bellecombe à travers une convention spéciale de déversement et un suivi strict de la qualité des rejets.

Le centre hospitalier Alpes Léman, une réponse adaptée aux missions de l’hôpital public – D’une capacité à terme de 445 lits, le CHAL ouvrira ses portes en février 2012 à Contamine sur Arve (Findrol). Environ 1 300 professionnels y travailleront. Outre sa démarche environnementale volontaire, ce nouvel outil présente d’autres caractéristiques : une offre de soins complète pour tous les âges de la population du secteur géographique Haute-Savoie Nord ; des domaines de compétence spécialisés (médecine nucléaire, aide médicale à la procréation, etc.) et innovants (irathérapie, urodynamique, etc.) ; des services de grande technicité, uniques sur le bassin genevois : réanimation, unité de soins intensifs de cardiologie, hémodialyse. Aux valeurs de l’hôpital public – l’accessibilité aux soins pour tous avec des tarifs de prestations maîtrisés et une facturation transparente et simplifiée La continuité des soins 24h/24 avec une permanence médicale dans les spécialités à risque – s’ajoutent des  conditions d’accueil améliorées : 82 % de chambres individuelles, des circuits simplifiés, de nombreux espaces de services et de convivialité, un cadre agréable, une crèche et une résidence hospitalière pour le personnel. Pour le ministère de la Santé, SIPIBEL s’inscrit pleinement dans le Plan national sur les résidus de médicaments – PNRM. Le futur PNRM va s’articuler autour de deux axes majeurs qui visent à :

  • évaluer les risques environnementaux et sanitaires par l’acquisition des connaissances scientifiques et techniques relatives à la présence, au devenir et aux effets de ces médicaments sur l’environnement et la santé humaine ;
  • mettre en place des mesures de gestion des risques environnementaux et sanitaires par des actions de contrôle et de réduction des émissions de médicaments dans l’environnement.

Ces objectifs correspondent donc parfaitement à ceux recherchés par le projet SIPIBEL. C’est aussi une occasion unique de pouvoir caractériser assez finement les effluents d’un hôpital de taille moyenne en milieu rural et d’acquérir des jeux de données, largement valorisables dans un futur proche via la mise en place d’actions similaires sur le territoire.


Un site expérimental pluridisciplinaire parfaitement adapté pour un programme scientifique et technologique

Le site de SIPIBEL, étant donné les infrastructures qu’il propose (nouvel hôpital, station d’épuration) est un lieu unique afin d’y mener des recherches multithématiques et transversales sur les relations entre les rejets d’une structure de soins, la qualité de l’environnement et l’évaluation des risques sanitaires. A partir de la définition d’un état initial, il est maintenant possible d’établir sur le site différents scénarios afin de maintenir le bon état écologique des eaux et de l’extrapoler aux établissements de même conformation.

La construction d’un consortium scientifique permet de fédérer des compétences nationales autour des différents aspects inhérents à cette problématique : caractérisation des rejets, définition d’indicateurs, dissémination de l’antibiorésistance et des micropollutions, écotoxicologie, modélisation. Le programme réunit les universités de Limoges (traitement des eaux usées et microbiologie), Paris Sud 11 (pharmacie), l’INSA de lyon (modélisation et métrologie), l’ENTPE (impacts toxicologiques) et le CNRS (analyses).

Le programme de travail défini associant des approches analytiques, technologiques, et d’impacts environnementaux et sanitaires doit permettre de proposer des solutions de gestion et de traitements des effluents d’activités de soin économiquement raisonnables et "environnementalement" durable.


Articuler recherche et performances épuratoires : l’Agence de l’eau, partenaire du projet SIPIBEL

L’action de l’Agence de l’eau s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de la surveillance des micropolluants et des substances dangereuses au niveau des stations d’épurations urbaines mais également dans le plan national sur les résidus médicamenteux.

La configuration particulière de la station d’épuration du syndicat de Bellecombe (trois filières d’épuration possibles) et la construction d’un nouvel hôpital font de ce site une zone atelier idéale pour mieux comprendre et appréhender la question de l’impact éventuel des rejets hospitaliers.

Faut-il traiter les résidus médicamenteux avant l’entrée en station d’épuration, au niveau de la station ou bien ne pas les traiter si le risque de pollution s’avère très faible ? Le projet SIPIBEL permettra de répondre à de multiples interrogations. Porté par le syndicat de Bellecombe dans un contexte dynamique où gestionnaires et scientifiques sont fortement impliqués, ce projet peut permettre d’apporter un éclairage à deux niveaux :

préciser si les rejets hospitaliers présentent un risque en termes de résidus en les mettant en comparaison avec les apports domestiques ;

asseoir des éléments de discours et des consignes de gestion sur cette question émergente.

Ainsi, les résultats des analyses menées sur la station d’épuration et sur le milieu récepteur pourraient bénéficier aux acteurs du bassin par retour d’expérience et nourrir les réflexions de l’Agence de l’eau sur l’enjeu relatif des effluents hospitaliers vis-à-vis des rejets médicamenteux urbains.

Dans le cadre de ce projet, l’Agence de l’eau finance la réalisation de l’état de référence ainsi que la coordination, le suivi des campagnes de mesures et la synthèse des résultats. Elle aide également les aménagements réalisés pour le raccordement des effluents hospitaliers sur la station d’épuration, ainsi que les équipements d’autosurveillance. .

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