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Changement climatique et environnemental dans le bassin méditerranéen

Résumé à l’intention des décideurs

Mots clés : Facteurs du changement environnemental, Ressources, Écosystèmes, Société, Gestion des risques, Résilience
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Titre Changement climatique et environnemental dans le bassin méditerranéen. Situation actuelle et risques pour le futur

Premier rapport d’évaluation sur la Méditerranée (MAR1)
Éditeur MedECC
Mediterranean Experts on Climate and Environmental Change
ISBN 978-2-9577416-2-5
Pages 37
Sortie septembre 2020

Résumé à l’intention des décideurs

MedECC

 

Pratiquement toutes les sous-régions continentales et marines du bassin méditerranéen sont impactées par les récents changements anthropiques dans l’environnement. Les principaux facteurs de changement incluent le climat (température, précipitations, courants atmosphériques, évènements extrêmes, hausse du niveau de la mer, température, salinité et acidification de l’eau de mer), la croissance démographique, la pollution, les pratiques non durables d’utilisation des sols et de la mer, et les espèces non-indigènes. Dans la plupart des régions, les écosystèmes naturels et les moyens de subsistance des humains sont affectés.

À cause des tendances mondiales et régionales de ces facteurs, les impacts seront exacerbés dans les décennies à venir, en particulier si le réchauffement climatique dépasse le niveau préindustriel de 1,5 à 2 °C.

Des efforts accrus sont nécessaires pour s’adapter aux changements inévitables, atténuer les facteurs de changement et accroître la résilience.

 

En raison des émissions anthropiques de gaz à effet de serre, la rapidité du changement climatique dans le bassin méditerranéen, historique et projeté par les modèles climatiques, est supérieure aux tendances mondiales. Les températures moyennes annuelles sur terre et sur mer dans le bassin méditerranéen sont 1,5 °C supérieures à celles de l’époque préindustrielle et elles devraient augmenter d’ici à 2100 de 3,8 à 6,5 °C pour un scénario de forte concentration de gaz à effet de serre (RCP8.5) et de 0,5 à 2,0 °C pour un scénario compatible avec l’objectif à long terme de l’Accord de Paris dans le cadre de la CCNUCC pour maintenir la température mondiale bien en-dessous de +2 °C au-dessus du niveau préindustriel (RCP2.6). Sur terre et sur mer, la durée et les températures maximales des épisodes caniculaires s’intensifieront. Malgré de fortes variations régionales, les précipitations estivales baisseront vraisemblablement de 10 à 30 % dans certaines régions, avec pour conséquence l’intensification des pénuries d’eau, la désertification et la baisse de la productivité agricole.

Il est virtuellement certain que le réchauffement des eaux de surface se poursuivra au XXIe siècle, de 1 à 4 °C selon le scénario (faibles ou fortes émissions de gaz à effet de serre) et il est vraisemblable que les eaux profondes de la Méditerranée vont se réchauffer plus que les autres océans du monde. L’augmentation des concentrations de dioxyde de carbone (CO2) provoque l’acidification de l’eau de mer et cette tendance se poursuivra. Le niveau moyen de la mer Méditerranée a augmenté de 6 cm au cours des 20 dernières années. Cette tendance va vraisemblablement s’accélérer (avec des différences régionales) à un taux mondial de 43 à 84 cm jusqu’en 2100, mais vraisemblablement de plus d’un mètre si la calotte glaciaire dans l’Antarctique se déstabilise davantage. 

La plupart des impacts du changement climatique sont exacerbés par d’autres problèmes environnementaux, comme le changement d’utilisation des sols, l’augmentation de l’urbanisation et du tourisme, l’intensification de l’agriculture, la surpêche, la dégradation des sols, la désertification et la pollution (de l’air, des sols, des rivières et des océans). Le dioxyde de souffre (SO2) et l’oxyde d’azote (NOx) ont récemment augmenté fortement, principalement à cause de l’activité maritime. Les concentrations d’ozone troposphérique (O3) augmentent en raison de la pollution et du réchauffement et les épisodes de hauts niveaux seront plus fréquents à l’avenir. Le transport des poussières sahariennes est également susceptible d’augmenter. La mer Méditerranée est fortement polluée par de multiples substances telles que le plastique, les contaminants émergeants, les métaux lourds, les bactéries fécales et les virus, dont la quantité devrait augmenter à l’avenir. 

La mer Méditerranée est envahie par de nombreuses espèces non-indigènes provenant en particulier de la mer Rouge, mais également du détroit de Gibraltar, du transport maritime et de l’aquaculture. Sur terre, des espèces nonindigènes sont particulièrement présentes dans les régions à fort développement infrastructurel et commercial, y compris des nuisibles phytophages introduits accidentellement et qui provoquent des dégâts dans les cultures et les forêts. Ces tendances devraient se poursuivre dans le futur. 

L’agriculture est la plus grande consommatrice d’eau dans la région Méditerranée. Le changement climatique, associé à des facteurs démographiques et socio-économiques, impacte les ressources hydriques, ce qui réduit la recharge des eaux de ruissellement et souterraines ainsi que la qualité de l’eau et augmente les conflits entre utilisateurs, la détérioration des écosystèmes et la salinisation des eaux souterraines dans les aquifères côtiers. La demande d’irrigation devrait augmenter de 4 à 18 % d’ici à 2100. Le changement démographique, notamment la croissance des grands centres urbains, pourrait accroître cette demande de 22 à 74 %. Il y a un potentiel d’amélioration de l’efficacité de l’utilisation et de la réutilisation de l’eau. D’autres adaptations importantes consistent à changer de pratiques agricoles et à favoriser le régime méditerranéen traditionnel, la production locale et la réduction des déchets alimentaires. 

Le changement climatique, les évènements extrêmes plus fréquents et intenses ainsi que l’augmentation de la salinisation des sols, de l’acidification des océans et de la dégradation des terres impactent fortement les activités de production terrestres et de produits de la mer. Le rendement des récoltes devrait baisser dans les décennies à venir dans la plupart des zones actuelles de production et pour la plupart des cultures agricoles. Cette situation sera potentiellement aggravée par les nuisibles et les pathogènes émergents. Recourir à des méthodes agro-écologiques en tant que pratiques et gestion agricoles présente un potentiel d’adaptation important, le stockage accru du carbone dans les sols offrant également un potentiel important en matière d’atténuation du changement climatique. Les pratiques de pêche non-durables, les espèces non-indigènes, le réchauffement, l’acidification et la pollution de l’eau menacent la production alimentaire marine et peuvent affecter la répartition des espèces et engendrer, d’ici à 2050, une extinction locale de plus de 20 % des poissons et invertébrés marins exploités. Une gestion plus rigoureuse de la pêche professionnelle en Méditerranée sera nécessaire pour s’adapter. La durabilité du secteur alimentaire méditerranéen (terrestre et marin) dépend également de la croissance démographique, du comportement des consommateurs régionaux (régime alimentaire) et des marchés alimentaires mondiaux (qui peuvent être affectés par une crise environnementale ailleurs).

La surpêche, le réchauffement, l’acidification et la multiplication des espèces non-indigènes provenant des eaux tropicales impactent également les écosystèmes marins et leur biodiversité. Les conséquences attendues incluent les pullulations de méduses, de mucilage et d’efflorescences algales, la réduction des stocks de poissons exploités par la pêche professionnelle et une perte générale de la biodiversité due à l’altération physiologique et écologique de la plupart des organismes marins. Il est possible d'atténuer ces impacts en améliorant la conservation à l’intérieur et au-delà des aires marines protégées, en recourant à des pratiques de pêche plus durables et en réduisant la pollution agricole, urbaine et industrielle. Dans les systèmes côtiers, la hausse du niveau de la mer impactera la plupart des infrastructures, les aquifères, les cultures côtières, le patrimoine mondial et les autres sites protégés, notamment dans les deltas et estuaires fluviaux. L’augmentation des flux de nutriments vers la mer augmente le nombre et la fréquence des proliférations de plancton et des pullulations de méduses avec des impacts négatifs sur la pêche professionnelle, l’aquaculture et la santé humaine. Les divers niveaux d’interactions terremer pourraient bénéficier de la mise en œuvre de nouvelles approches de gestion intégrée des zones côtières fondée sur les écosystèmes et de planification de la conservation.

La biodiversité terrestre connaît de multiples changements. Dans les pays de la rive nord, la surface boisée augmente aux dépens de l’agriculture et du pâturage extensifs, alors que les écosystèmes dans les pays du sud sont encore menacés de fragmentation ou de disparition en raison du défrichement et de la culture, de la surexploitation du bois de chauffage et du surpâturage. Au cours des 40 dernières années, les changements de biodiversité et la disparition d’espèces ont conduit à une homogénéisation et une simplification générale des interactions biotiques. La moitié des zones humides a été perdue ou détériorée, une tendance qui devrait se poursuivre. Il est attendu une extension des terres arides et une augmentation des zones brûlées lors d’incendies plus fréquents. Les options d’adaptation pour la biodiversité terrestre incluent la préservation de la variabilité du débit naturel des cours d’eau méditerranéens et la protection des zones riveraines, la réduction du captage d’eau, la modification des pratiques sylvicoles, la promotion d’une connectivité des paysages favorable au climat. 

Les températures élevées ainsi que la pollution de l’air et de l’eau dans le bassin méditerranéen affectent déjà la santé humaine. Les impacts combinés des changements environnementaux attendus (notamment la pollution de l’air et le climat) augmentent les risques pour la santé humaine résultant des canicules, des pénuries alimentaires et d’eau, ainsi que des maladies respiratoires et cardio-vasculaires à transmission vectorielle. Ces risques sanitaires touchent particulièrement les populations défavorisées et vulnérables, notamment les personnes âgées, les enfants, les femmes enceintes et les personnes à faibles revenus. La sécurité des personnes est confrontée à de nouveaux risques liés à des évènements extrêmes, en particulier dans les zones côtières. Les conflits provoqués par la rareté des ressources et les migrations humaines sont susceptibles d’augmenter à cause de la sécheresse et de la détérioration des ressources agricoles et halieutiques, mais des facteurs socio-économiques et politiques joueront vraisemblablement encore un rôle majeur.

Les villes méditerranéennes se développent sous l’effet de la croissance démographique et des changements socio-économiques, notamment sur le littoral des pays du sud. Du fait de l’augmentation du stress thermique, l’aménagement et la gestion des villes bordant la Méditerranée devront être davantage axés sur la santé humaine et la résilience aux changements environnementaux. Les impacts du changement climatique sur les zones urbaines devraient être disproportionnellement élevés du fait de la concentration de la population et des infrastructures – en particulier dans les zones à haut risque – combinée à des conditions qui augmentent le danger (par exemple, le ruissellement accru dû à l’artificialisation des sols ou les effets d’îlots de chaleur urbain). Le tourisme sera sûrement affecté par le changement climatique via la réduction du confort thermique, la dégradation des ressources naturelles, notamment la disponibilité d’eau douce, et l’érosion côtière due à la hausse du niveau de la mer et à l’urbanisation. L’effet économique net sur le tourisme dépendra du pays et de la saison. 

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Tous les pays méditerranéens présentent un potentiel important pour atténuer le changement climatique grâce à une transition énergétique accélérée, ce qui implique la réduction et l’arrêt progressifs des combustibles fossiles et le développement accéléré des énergies renouvelables. Cette transition énergétique ambitieuse, qui va au-delà des plans et des objectifs annoncés par les autorités et les décideurs conformément aux contributions nationales prévues par l’Accord de Paris dans la cadre de la CCNUCC, exige une transformation importante des politiques énergétiques et des modèles économiques dans les pays Méditerranéens. Alors que les pays de la rive nord se sont engagés dans cette transition en diversifiant graduellement leur bouquet énergétique, en améliorant l’efficacité énergétique et en augmentant la part des énergies renouvelables, ceux de la rive est et sud, malgré certains investissements, ont besoin d’aide, de financement, de transfert de technologie et de renforcement des capacités dans le cadre de l’Accord de Paris de la CCNUCC. À l’horizon 2040, la part des énergies renouvelables pourrait tripler pour atteindre 13 à 27 % selon les scénarios de transition actuels. L’intégration et la coopération régionale accrue dans le marché de l’énergie sont cruciales pour atténuer le changement climatique de manière rentable.

Des réponses politiques aux changements climatiques et environnementaux plus efficaces impliqueront de renforcer l’atténuation des facteurs du changement environnemental tels que les émissions de gaz à effet de serre, mais également d’améliorer l’adaptation aux impacts. La pauvreté, les inégalités et le déséquilibre hommes/femmes font actuellement obstacle au développement durable et à la résilience climatique dans les pays méditerranéens. La culture est un facteur essentiel dans le succès des politiques d’adaptation dans le cadre multiculturel extrêmement varié du bassin méditerranéen. Ayant pour objectif de soutenir des communautés locales et vulnérables, les politiques en matière d’adaptation climatique et de résilience environnementale doivent tenir compte des enjeux tels que la justice, l’égalité, la lutte contre la pauvreté, l’inclusion sociale et la redistribution. Afin d’étayer les politiques en matière de développement durable avec des preuves scientifiques sur le changement climatique et environnemental, le premier rapport d’évaluation sur la Méditerranée (MAR1) présente une synthèse des connaissances scientifiques actuelles dans la plupart des disciplines, secteurs et sous-régions concernés.


Sommaire
– 1. Contexte de l’évaluation. 2. Facteurs du changement environnemental dans le bassin méditerranéen : Changement climatique ; Pollution ; Changements d’utilisation des terres et de la mer ; Espèces non-indigènes. 3. Ressources : Eau ; Alimentation ; Énergie. 4. Écosystèmes : Écosystèmes marins ; Écosystèmes côtiers ; Écosystèmes terrestres. 5. Société : Développement ; Santé humaine ; Sécurité des personnes. 6. Gestion des risques futurs et amélioration de la résilience socio-écologique en Méditerranée.