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Dossier de la rédaction de H2o   |
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07/05/2025 | |
Des milliers de tonnes d’antibiotiques utilisés en santé humaine finissent chaque année dans nos cours d’eau, où ils ont un impact encore mal compris sur l’écosystème et la progression de l’antibiorésistance, prévient Heloisa Ehalt Macedo, chercheuse post-doctorale au département de géographie de l’Université McGill. Elle et son équipe ont entrepris un décompte : si on ne tient compte que des 40 antibiotiques les plus utilisés en médecine humaine, ce sont quelque 30 000 tonnes qui sont prescrites chaque année ; un peu plus de 20 000 tonnes se retrouveraient dans l’environnement après que les molécules eurent été métabolisées, environ 10 000 tonnes rejoignent les eaux de surface après traitement ou atténuation naturelle dans les sols, et un peu plus de 3 200 tonnes atteignent ultimement les océans et les puits continentaux. "Les résultats indiquent que les charges de contaminants associées à la consommation humaine directe d’antibiotiques représentent une source considérable de risques pour les écosystèmes aquatiques et la santé humaine", écrivent les auteurs. Néanmoins ces chiffres ne fournissent qu’un aperçu très fragmentaire de la situation puisqu’ils ne tiennent compte que des 40 antibiotiques les plus utilisés en médecine humaine, et non de toutes les molécules, pas plus qu’ils ne tiennent compte des antibiotiques utilisés, par exemple, en médecine vétérinaire ou en aquaculture. Les sept antibiotiques identifiés comme étant les principaux responsables des risques liés à la consommation humaine figurent également sur la liste des agents antimicrobiens d’importance vétérinaire, rappellent les auteurs de l’étude, à savoir que leur utilisation est également autorisée chez les animaux producteurs de denrées alimentaires. Cela pourrait contribuer à la contamination des eaux de surface dans les régions où les pratiques d’élevage sont courantes, disent-ils. Enfin, le modèle mathématique ne tient enfin pas compte des fluctuations saisonnières qui peuvent se produire, notamment lors de la saison de la grippe ou quand la pluie se fait plus rare. "Même si nous n’estimons que les antibiotiques provenant uniquement de l’homme, sans tenir compte des antibiotiques vétérinaires ou industriels ou de toute autre source, nous constatons que les concentrations dans les cours d’eau sont significatives", a souligné Mme Macedo. Cette étude, a-t-elle ajouté, n’est qu’un "point de départ" calculé à partir de la consommation humaine. Il faut maintenant d’autres travaux pour mesurer, par exemple, avec quelle efficacité les usines de traitement des eaux usées éliminent les antibiotiques – surtout quand on se souvient qu’elles reçoivent souvent des eaux provenant d’industries pharmaceutiques – ou encore la rapidité avec laquelle les molécules se dégradent dans l’environnement. Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal scientifique PNAS Nexus.
Jean-Benoit Legault, La Presse canadienne – Le Devoir |