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Le big data crée une tempête dans les modélisations du climat

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Dossier de
la rédaction de H2o
  
16/06/2022

L’intensification des tempêtes a atteint les niveaux prévus en 2080 ; un constat qui impose de revoir les modèles du climat

Le climat de la Terre change plus vite que prévu. Une nouvelle étude menée par l’Institut Weizmann des Sciences (Israël) révèle que les tempêtes dans l’hémisphère sud ont déjà atteint des niveaux d’intensité précédemment prévus pour ne se produire qu’en 2080. Une équipe de scientifiques dirigée par le Dr Rei Chemke du département des Sciences de la Terre et des Planètes de l’Institut Weizmann a révélé une intensification considérable des tempêtes hivernales dans l’hémisphère sud. L’étude a été menée en collaboration avec le Dr Yi Ming de l’Université de Princeton et le Dr Janni Yuval du MIT (États-Unis).

Jusqu’à présent, les modèles climatiques n’ont prévu une intensification des tempêtes hivernales d’origine humaine que vers la fin de ce siècle. Dans cette nouvelle étude, Rei Chemke et son équipe ont comparé les simulations de modèles climatiques avec les observations de tempêtes actuelles. Leur découverte est alarmante : il est désormais clair que l’intensification des tempêtes au cours des dernières décennies a déjà atteint les niveaux prévus pour l’année 2080. "Une tempête hivernale est un phénomène météorologique qui ne dure que quelques jours. Individuellement, chaque tempête n’a pas beaucoup de poids climatique. Cependant, l’effet à long terme des tempêtes hivernales devient évident lors de l’évaluation des données cumulatives recueillies sur de longues périodes", explique le Dr Chemke. Cumulativement, ces tempêtes ont un impact significatif, affectant les transferts de chaleur, d’humidité et de quantité de mouvements dans l’atmosphère, ce qui affecte par conséquent les différentes zones climatiques de la Terre. Un exemple est le rôle que jouent les tempêtes dans la régulation de la température aux pôles de la planète. Les tempêtes hivernales sont responsables de la majorité du transport de chaleur des régions tropicales vers les pôles. Sans leur contribution, les températures moyennes au pôle seraient inférieures d’environ 30 °C. De même, l’intensification collective de ces tempêtes constitue une menace réelle et significative pour les sociétés de l’hémisphère sud au cours des prochaines décennies. "Nous avons choisi de nous concentrer sur l’hémisphère sud parce que l’intensification enregistrée là-bas a été plus forte que dans l’hémisphère nord", explique Rei Chemke. "Nous n’avons pas examiné l’hémisphère nord, mais il semble que l’intensification des tempêtes dans cet hémisphère soit plus lente que dans l’hémisphère sud. Si la tendance persiste nous observerons une intensification plus importante des tempêtes hivernales ici dans les années et les décennies à venir." Dans son laboratoire de l’Institut Weizmann, Rei Chemke étudie les mécanismes physiques sous-jacents au changement climatique à grande échelle. Dans cette étude, lui et ses collègues de recherche ont cherché à comprendre si ces changements dans les régimes climatiques étaient causés par des facteurs externes (comme l’activité humaine) ou s’ils résultaient des fluctuations internes du système climatique mondial. Ils ont analysé des modèles climatiques qui simulaient des schémas d’intensification des tempêtes sous l’influence isolée de causes climatiques internes, sans impact externe. Ils ont montré qu’au cours des 20 dernières années, les tempêtes se sont intensifiées plus rapidement que ce qui peut être expliqué par le seul comportement climatique interne. De plus, les chercheurs ont découvert le processus physique derrière l’intensification de la tempête. Une analyse du taux de croissance des tempêtes a montré que les changements dans les courants-jets atmosphériques au cours des dernières décennies ont provoqué ces escalades, que les modèles climatiques actuels sont incapables de refléter avec précision. Cette étude a deux implications immédiates et considérables : elle montre, d’une part, que non seulement les projections climatiques pour les décennies à venir sont plus graves que les évaluations précédentes, et cela suggère également que l’activité humaine pourrait avoir un impact plus important sur l’hémisphère sud que ce qui avait été estimé précédemment ; d’autre part, qu’une correction du biais dans les modèles climatiques est nécessaire afin que ceux-ci puissent fournir une projection climatique plus précise à l’avenir.

Publication dans Nature Climate Change – 26 mai 2022
Israël Science info