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Barrages et réservoirs : Leurs effets pervers en cas de sécheresses longues

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Dossier de
la rédaction de H2o
  
28/08/2022

Les vagues de chaleur et de sécheresse sans précédent en France et plus largement en Europe continentale, avec une succession d'incendies et assèchement des nappes phréatiques seront, selon les projections des hydrologues, de plus en plus fréquentes, voire la "nouvelle norme". Ces phénomènes, qui s'accélèrent, sont par ailleurs constatés dans différentes régions du monde. Ces phénomènes sont directement impactés par le dérèglement climatique, et on anticipe dans le futur des sécheresses plus fréquentes, plus étendues et plus intenses sur une grande partie du globe, et tout particulièrement en France. Pour lutter contre les sécheresses, le stockage de l’eau est souvent prôné comme une solution. L’idée est de faire des réserves avec l’eau disponible en périodes pluvieuses (hiver) afin d’en conserver pour des usages ultérieurs (en été). Le monde compterait ainsi plus de 16 millions de barrages, totalisant une capacité de stockage estimée entre 7 000 et 10 000 km3, soit 2 à 3 fois les volumes d’eau contenus dans les rivières du globe. Les quantités stockées ont fortement augmenté depuis le début du XXe siècle, afin de répondre à une demande croissante d’eau pour les activités humaines. Cela a permis d’étudier l’impact de ces retenues, à la fois sur la ressource et sur la demande, et d’identifier des conséquences sur l’occurrence de sécheresses. En stockant de l’eau durant les périodes d’abondance pour en favoriser l’usage lors des périodes de basses eaux, les retenues permettent de réduire l’impact de nombreuses crues et sécheresses. Cette efficacité est toutefois limitée aux événements peu intenses. De fait, de nombreuses études montrent que l’efficacité des barrages est très réduite pour les sécheresses longues. Ces barrages conduisent en outre à un renforcement des sécheresses à l’aval des bassins. Par ailleurs, plutôt que de développer des stratégies de réduction des consommations, on induit une dépendance accrue aux infrastructures d’approvisionnement en eau : ce qui renforce la vulnérabilité et les dégâts économiques en cas de pénurie d’eau. Enfin, l’amplification des sécheresses par les activités humaines est si marquée qu’a émergé la notion de sécheresse "anthropique", impliquant des épisodes secs dus aux prélèvements et à la gestion par des réservoirs, indépendamment des conditions climatiques.

L'article de Florence Habets, directrice de recherche en hydrométéorologie au CNRS, professeure à l'École normale supérieure (ENS) – The Conversation