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France
Évaluation des actions financières du programme Écophyto

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Dossier de
la rédaction de H2o
  
05/07/2023

Les résultats ne sont pas au rendez-vous

Une mission interministérielle a été chargée d'évaluer les actions financières du programme Écophyto afin d'améliorer l'efficacité du plan de réduction des usages agricoles des produits phytopharmaceutiques.

Issu du Grenelle de l’environnement, le premier plan Écophyto affirmait en 2008 une volonté de réduire l’usage des produits phytopharmaceutiques agricoles de 50 % à horizon 2018 et constituait la réponse française à la directive européenne 2009/128/CE. En 2015, devant la faiblesse des résultats, un plan Écophyto 2 a été défini. L’objectif de -50 % est repoussé en 2025 avec un objectif intermédiaire de -25 % à horizon 2020. En 2018, le Gouvernement décide un "plan d’action sur les produits phytopharmaceutiques (PPP) et une agriculture moins dépendante aux pesticides" complété de l’objectif de "sortir du glyphosate", et amende le plan qui prend le nom d’Écophyto 2+.

Cette politique publique utilise en priorité des outils de communication, d’animation et de promotion des bonnes pratiques agricoles. Elle mise principalement sur le "regard par-dessus la haie" pour que les pratiques identifiées percolent dans l’ensemble de la profession, et mobilise la recherche et la formation pour identifier, inventer et promouvoir les alternatives les plus efficaces. Cette approche globale a été complétée par le retrait de certaines autorisations de substances dangereuses, à l’échelon européen, et par des mesures réglementaires relatives aux autorisations de mise sur le marché des produits, et sur leurs conditions d’usage. Pourtant, les résultats mesurés à l’aune de cet objectif quantitatif de réduction de 50 % s’avèrent décevants, même s’ils sous-estiment l’ampleur des changements engagés. Les indicateurs utilisés sont eux-mêmes contestés. Suite à un référé de la Cour des comptes (2019) pointant notamment les difficultés de la gouvernance du plan Écophyto et de la gestion du programme, le gouvernement a commandé une mission d’évaluation de leurs actions financières. Les commanditaires ont en particulier demandé d’évaluer la valeur ajoutée apportée par les actions financées au niveau national par la redevance pour pollutions diffuses, et de proposer des améliorations du pilotage du programme et de sa gestion. Les constats de la mission reprennent ceux de la Cour des comptes en matière de gouvernance et de gestion, mais interrogent également les principaux objectifs et actions du plan, qui n’ont, jusqu’à présent, pas été évalués ni fait suffisamment la preuve de leur efficacité. En particulier, les dispositifs d’accompagnement des agriculteurs, comme les fermes DEPHY ou les fermes "30 000" ont démontré l’existence de solutions pour réduire les PPP, sans parvenir en moyenne aux niveaux de baisse envisagés (-50%) dans ces exploitations, ni déboucher sur une massification des pratiques ni même à une transformation du conseil aux agriculteurs. Pourtant, les ressources mobilisées pour le plan Écophyto (643 millions d’euros en 2019) sont bien supérieures à celles du seul programme financé par la redevance pour pollutions diffuses (41 millions d’euros au niveau national et 30 millions d’euros au niveau régional) mais ne peuvent à elles seules contrebalancer certaines orientations des politiques agricoles nationales et européennes. La gouvernance stratégique du plan n’est pas suffisamment concentrée sur la mise en cohérence des politiques publiques, et pèche encore par l’insuffisance d’évaluations validées par un conseil scientifique. La mise en œuvre opérationnelle du programme annuel est quant à elle fragilisée par l’absence d’un réel "chef de projet", entraînant ainsi l’approbation tardive de la programmation annuelle et un décalage dans le temps de sa mise en œuvre. La gestion financière n’est pas attribuée aux responsables des actions du programme, mais à des opérateurs dont les missions ne sont pas centrées sur Écophyto. Le manque d’articulation entre les volets national et territorial du programme est reconnu. Si le plan a démontré qu’une réduction de l’usage des PPP est possible et, dans certaines conditions, compatible avec le maintien du revenu agricole, aucune des actions menées jusqu’à présent dans le cadre du plan, et a fortiori de son programme national, ne semble susceptible d’entraîner la massification de ces démarches de substitution aux PPP, à l’exception du développement de l’agriculture biologique.

Convaincue de la place du plan Écophyto dans la transformation de l’agriculture, la mission propose de répondre à chacun de ces constats et formule des recommandations pour améliorer la gouvernance, le processus de programmation, le choix des indicateurs, la mise en œuvre du programme et l’évaluation des actions soutenues. La mission recommande également de définir une nouvelle trajectoire à dix ans de réduction des PPP cohérente avec la nouvelle politique agricole commune (PAC) et l’ensemble des politiques conduites aux plans européen et national, et incluant un dispositif de massification.

Rapport CGAAER/IGEDD