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France, Rhône-Méditerranée
Anguille européenne : Lancement d’un suivi inédit sur le Rhône

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Dossier de
la rédaction de H2o
  
12/12/2018

Dans le cadre d’un projet de recherche partenariale, la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) et des scientifiques du centre IRSTEA de Lyon mettent en place une expérimentation de grande envergure pour étudier les voies de franchissement des aménagements hydroélectriques par les anguilles adultes qui entament leur redescente vers la mer. L’objectif est d’apporter des données fiables en réponse aux exigences réglementaires relatives à la sauvegarde de l’espèce, mais aussi mieux connaître les processus biologiques qui régissent le cycle de vie de cette espèce en voie d’extinction.

L’anguille européenne fait partie des espèces en danger critique d’extinction ; elle figure sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) depuis 2008. En cohérence avec la règlementation européenne, la France a mis en place un plan national de sauvegarde qui vise à réduire la mortalité des anguilles due aux activités humaines, parmi lesquelles la production d’hydroélectricité. Les aménagements hydroélectriques peuvent en effet représenter des obstacles, voire des dangers, pour cette espèce migratrice qui passe l’essentiel de sa vie en eau douce et se reproduit en mer des Sargasses dans les Caraïbes. Ils peuvent entraver ses déplacements lors de la montaison, lorsque les petites anguilles (civelles, anguillettes) nées en mer remontent le long des fleuves, ou lors de la dévalaison, lorsque les anguilles adultes et matures sexuellement (anguilles argentées) redescendent le fleuve vers la mer pour aller se reproduire. Pour répondre aux objectifs réglementaires du plan national de sauvegarde et de sa déclinaison à l’échelle locale du bassin versant Rhône-Méditerranée, la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), concessionnaire du fleuve pour la navigation, l’irrigation et la production d’électricité, vient d’entreprendre, en collaboration avec l’équipe Dynamiques et modèles en écohydrologie d’IRSTEA, le projet DAARAC, visant à mieux comprendre comment les anguilles franchissent les aménagements conçus et gérés par l’industriel, et en particulier celui situé à Caderousse (Vaucluse), lors de leur dévalaison. La méthodologie du suivi des anguilles repose sur la télémétrie acoustique, une technologie qui permet d’enregistrer les sons transportés dans l’eau. Concrètement, il s’agira de capturer sur les trois années de suivi environ 300 individus en cours de maturation sexuelle et qui se préparent à la dévalaison, pour les marquer (implantation d’un émetteur par chirurgie), et par ailleurs, d’équiper les différentes voies de passage à travers l’aménagement de Caderousse (écluse, aval de l’usine, vieux lit du Rhône…) avec des hydrophones qui pourront détecter – ou non – leur passage. À l’issue de la première année du projet, la zone d’étude qui couvre 90 kilomètres est désormais entièrement équipée : depuis les différents points de l’aménagement de Caderousse jusqu’en Arles, porte du delta de Camargue. En plus de ces points fixes, des hydrophones mobiles, embarqués sur bateau, permettront d’affiner le suivi. La première session de capture réalisée début septembre a déjà permis d’équiper et de relâcher 72 individus. Outre une meilleure appréhension de l’impact réel et global des activités de CNR sur la population d’anguilles dévalantes, les observations donneront aux chercheurs des éléments pour l’analyse comportementale des poissons face à un changement physique de leur milieu, comme les éléments qui déclenchent sa dévalaison ou ceux qui orientent le choix de la voie qu’ils empruntent à travers les ouvrages qu’ils rencontrent. "À l’instar de tous nos travaux qui visent à étudier le comportement de différentes espèces de poissons et à développer des outils pour évaluer l’impact des ouvrages hydrauliques sur ces populations, notre objectif in fine est d’accompagner les gestionnaires d’ouvrages, comme la CNR, vers les choix de conception ou de gestion les mieux adaptés pour maintenir leur activité tout en minimisant au maximum leur impact écologique sur le milieu naturel et les espèces qu’il renferme", explique Hervé Capra, chercheur en écohydrologie et responsable scientifique du projet pour IRSTEA.

Photos – Pose d’hydrophone sur le Vieux Rhône, à Caderousse. CNR / IRSTEA
Plan de gestion de l’anguille dans le bassin Rhône-Méditerranée
IRSTEA

 

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