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La sécurité alimentaire menacée dans des bassins d'Afrique

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Dossier de
la rédaction de H2o
  
08/12/2011

Bien que l'Afrique ait réussi à éviter les conflits sur les cours d'eau partagés, elle aura besoin d'une diplomatie plus grande pour maintenir cette paix puisqu'une nouvelle étude indique que les changements climatiques auront une incidence sur la productivité alimentaire.

"Les changements climatiques introduisent un nouvel élément d'incertitude juste au moment où les gouvernements et les donateurs commencent à avoir des discussions plus ouvertes sur le partage des ressources en eau et à envisager des investissements à long terme pour renforcer la production alimentaire", a déclaré Alain Vidal, directeur du Programme de défi pour l'eau et l'alimentation –CPWF, du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale – CGIAR, à plus de 300 délégués participant au troisième Forum international sur l'eau et l'alimentation qui était organisé à Pretoria, en Afrique du Sud, du 11 au 18 novembre.

"Pour éviter que cette incertitude sape les accords et engagements clé, les chercheurs doivent développer une base fiable pour des décisions, qui prenne en compte les effets variables des changements climatiques sur les bassins fluviaux." Des scientifiques à ce forum mondial de l'eau ont ajouté que les changements climatiques augmenteront la pression de l'eau sur les bassins déjà sous pression du Limpopo, du Nil et de la Volta, dont dépendent plus de 300 millions de personnes. Vidal a indiqué que de nouveaux aperçus sur l'effet des changements climatiques sur les bassins fluviaux demandent que l'on repense les hypothèses concernant la disponibilité de l'eau. Toutefois, un investissement dans la recherche, pour soutenir les politiques de l'eau adoptées avec prévoyance, donnera aux décideurs les informations dont ils ont besoin pour relever les défis introduits par les changements climatiques qui pourraient autrement entraver les accords et investissements dans la sécurité alimentaire, a-t-il expliqué.

Dans le cadre d'un projet de recherche mondiale sur cinq ans, des scientifiques, venus de plus de huit grandes institutions de recherche à travers le monde, ont examiné l'effet potentiel que les températures plus élevées et le changement des précipitations causés par les changements climatiques auraient sur les bassins fluviaux dans le monde en 2050. Les scientifiques du CPWF affirment que certains scénarios troublants ont émergé pour des parties de l'Afrique, particulièrement dans le bassin du Limpopo, en Afrique australe, qui abrite 14 millions de personnes. En utilisant les données moyennes des modèles climatiques du Groupe intergouvernemental sur les changements climatiques, les scientifiques du CPWF ont constaté que la hausse des températures et la diminution des précipitations dans le bassin du Limpopo, au cours des prochaines décennies, affecteraient l'environnement déjà marginal, faisant baisser la production alimentaire tout en intensifiant la pauvreté. "Nous devons nous poser la question de savoir si les stratégies actuelles de développement agricole dans le bassin du Limpopo, qui sont fondées sur les niveaux actuels de disponibilité de l'eau, sont en fait réalistes pour un avenir climatique qui peut présenter de nouveaux défis et différentes opportunités", a déclaré Simon Cook, un scientifique au Centre international d'agriculture tropicale et directeur des Projets focaux du CPWF sur les bassins. "Dans certaines parties du bassin du Limpopo, même l'adoption généralisée des innovations comme l'irrigation au goutte-à-goutte peuvent ne pas suffire pour maîtriser les effets négatifs des changements climatiques sur la disponibilité de l'eau", a ajouté Cook. "Mais dans d'autres régions, des investissements dans l'agriculture pluviale, tels que la récolte de l'eau de pluie, les trous "zai" (trous à semis profonds) et les petits réservoirs pourraient être mieux placés."

La gestion des eaux de pluie est perçue en Afrique comme la clé pour améliorer à la fois les cultures et le bétail. Des moyens novateurs pour faire un usage productif des eaux de pluie sont également vantés comme une nouvelle approche "climatique astucieuse" de l'agriculture. Par exemple, de petits réservoirs peuvent être utilisés pour stocker l'eau pendant les périodes sèches ou pour aider à contrôler les inondations. "Ces approches décentralisées de l'agriculture avec l'eau de pluie sont peu coûteuses, hautement adaptables et fournissent des options immédiates aux agriculteurs d'être eux-mêmes des gestionnaires de l'eau", a déclaré Lindiwe Sibanda, directrice générale du Food, Agriculture and Natural Resources Policy Analysis Network – Réseau d'analyse des politiques sur l'alimentation, l'agriculture et les ressources naturelles. "Le renforcement de la capacité d'adaptation des fermiers à faire face aux défis actuels est astucieux, même sans les changements climatiques, mais c'est un impératif absolu maintenant que nous voyons ce que réserve l'avenir", a-t-elle ajouté.

Les changements climatiques pourraient également introduire des incertitudes dans la politique de l'eau du bassin du Nil. L'analyse du CPWF montre que des températures plus élevées (les températures devraient augmenter de 2 à 5° C d'ici à 2050) pourraient entraîner une augmentation de l'évaporation de l'eau et réduire l'équilibre de l'eau du bassin du haut Nil bleu.

Les experts espèrent que le lien étroit entre les changements climatiques et la sécurité alimentaire favorisera les négociations climatiques mondiales, notamment pour la 17ème Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques organisée à Durban, en Afrique du Sud. "Mais l'eau pour l'alimentation et l'agriculture et l'effet des changements climatiques sur la sécurité alimentaire mondiale sont à peine une préoccupation pour les négociateurs qui se réuniront à Durban à la fin de ce mois", a ajouté Sibanda.

Busani Bafana, IPS (Pretoria) – AllAfrica 17-11-2011