H2o Magazine


Eau de Paris
L'eau des Parisiens passée aux UV

Mots clés : Eau de Paris, Joinville, Orly, traitement aux ultraviolets, UV, Degrémont, Aquaray®H20
Dossier de
Martine LE BEC
  
June 2009

Pour répondre aux nouvelles exigences réglementaires concernant les parasites et les bromates, Eau de Paris ajoute une étape de traitement aux ultraviolets des eaux de surface sur ses usines de Joinville et d’Orly.

Martine LE BEC
photographies C. Dupont – Eau de Paris & Degrémont

H2o – juin 2009

 

À Paris, la moitié de l’eau potable consommée provient des usines d’Orly et de Joinville, qui prélèvent de l’eau respectivement dans la Seine et dans la Marne pour la rendre potable. Confrontée aux nouveaux risques sanitaires constitués par certains parasites, Eau de Paris a choisi de mettre en œuvre un nouveau traitement complémentaire aux ultraviolets. Ce traitement, qui vient renforcer la barrière désinfectante des usines, permet de diminuer le traitement à l’ozone pendant l’été, limitant ainsi le risque de formation des bromates. L'opérateur a opté pour une étape de désinfection placée en sortie des filtres à charbon actif en grains, ce qui permet d’ajuster les volumes à traiter et de garantir ainsi une eau d’excellente qualité au meilleur coût pour l’usager.

Avec une capacité de traitement de 300 000 m3/jour sur chaque usine, le projet  constitue le plus important marché européen attribué pour la désinfection de l’eau potable à l’aide d’ultraviolets. C'est Degrémont Technologies-Ozonia (groupe Suez Environnement) qui a remporté l’appel d’offre, lancé fin 2007. L'industriel est le seul à avoir à ce jour  obtenu l’agrément du Ministère de la Santé, suite à un avis favorable de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments – AFSSA, pour traiter la plage de débit couverte par sa gamme Aquaray®H20, 20 "Mono et 20" Duplex.

Une première étude lancée en 2006 avait estimé l'investissement à près de 20 millions d'euros ; les progrès technologiques réalisés sur les lampes ont ramené cet investissement à 5,4 millions d'euros pour les deux usines d’Orly et de Joinville.

Lutter contre les parasites tout en réduisant les concentrations en bromates

Les ions bromate sont des composés supposés cancérigènes formés principalement par la réaction entre l’ozone et les bromures naturellement présents dans l’eau. Le renforcement de l’efficacité du traitement par l’ozone avec des unités de désinfection UV permet de continuer à garantir une eau potable d’une qualité irréprochable tout en répondant à une double problématique :

  • garantir que les eaux potables distribuées ne contiennent pas de microorganismes, de parasites (Cryptosporidium Parvum, Giardia Lamblia) ou toutes autres substances présentant un danger pour la santé des consommateurs;
  • respecter la nouvelle limitation de concentration maximale acceptable en bromates, définie par le Code de la Santé Publique, abaissée à 10 μg/L (au lieu de 25 μg/L) depuis le 25 décembre 2008.

En effet, aujourd’hui, les eaux destinées à une consommation humaine nécessitent des traitements de plus en plus importants. Le renforcement des usines de Joinville et Orly avec des unités de désinfection UV permet de mieux prémunir les consommateurs contre les risques sanitaires liés à la présence de parasites de type Cryptosporidium Parvum et Giardia Lamblia tout en diminuant les quantités d’ozone injectées afin de respecter la nouvelle limitation de concentration en bromates.

Installer des réacteurs UV en garantissant le bon fonctionnement des installations existantes

Le projet consistait à intégrer le réacteur UV dans la ligne d’eau existante, en minimisant les pertes de charge à l’aide d’une analyse fonctionnelle du couplage filtres réacteurs UV et garantir une dose de 40 mJ/cm2 pour les conditions les plus défavorables (débit maximum, transmittance minimum).

La continuité de service tout au long de la mise en œuvre du projet était un impératif majeur. Une attention particulière a donc été apportée à l’étude et à la modélisation afin de garantir le respect des consignes inscrites dans le cahier des charges et de ne pas perturber le fonctionnement des installations en place.

Après validation des conditions de fonctionnement propres aux deux sites, Degrémont Technologies-Ozonia a développé un paramétrage de la modélisation hydraulique très poussé (dite CFD – Computerized Fluid Dynamic), permettant de calculer et quantifier très précisément les incidences des perturbations hydrauliques et des pertes de charge.

Cette étude préliminaire a démontré notamment que l’installation des réacteurs UV ne perturbait pas l’hydraulique de la station et que compte tenu des faibles pertes de charge qu’ils génèrent, ils pouvaient être insérés sur la conduite de collecte de l’eau filtrée, en sortie de filtres à charbon actif. Elle a également démontré que le diamètre DN 500 était le mieux adapté aux conditions de fonctionnement existantes. Le couplage réacteur/vanne garantit le respect des pertes de charges notifiées dans le cahier des charges et le bon fonctionnement de la régulation hydraulique.

Des réacteurs UV moyenne pression à la pointe de l’innovation

Les traitements par UV ne modifiant pas les paramètres physico-chimiques de l’eau, les objectifs d’abattement – 4 log sur les bactéries, virus et parasites – ne peuvent pas être contrôlés immédiatement en sortie de réacteurs UV. La seule manière de vérifier l’efficacité des traitements est donc de réaliser, sur une installation réelle, par des organismes agrées, des tests d’abattement biologique sur des germes déterminés, appelés BioAssay. Ces tests sont réalisés par le DVGW (certification allemande) ou l’US EPA (certification américaine). De plus, en France, lorsqu’elles sont utilisées pour prévenir des risques parasitaires, les solutions de traitement par UV doivent également faire l’objet d’un agrément délivré par le Ministère de la Santé.

Aquaray®H20 repose sur un réacteur fermé équipé de lampes à moyenne pression. La technologie UV moyenne pression utilise des lampes beaucoup plus puissantes que les lampes dites basse pression. Les lampes moyenne pression, sont de spectre polychromatique, ce qui renforce leur efficacité sur les sites de production enzymatique des cellules et permet une plus longue inactivation. Cette puissance permet de réduire le nombre de lampes nécessaires – seulement 6 lampes par réacteur pour Joinville et 12 lampes pour Orly pour un traitement de 300 000 m3/jour – et donc de baisser considérablement le coût d’exploitation et de maintenance des réacteurs (lampes et main d’oeuvre).

Des calculs précis ont permis de définir les dimensions optimales du réacteur, l’espacement entre les lampes à moyenne pression et l’emplacement des déflecteurs. Ces calculs ont permis de concevoir des réacteurs compacts tout en garantissant une efficacité maximale et une perte de charge minimale.


JOINVILLE + ORLY
La moitié de l'eau potable de Paris

 

La moitié de l’eau potable consommée à Paris provient des usines de traitement des eaux
de rivière situées sur les communes de Joinville et d’Orly. Ces usines traitent respectivement l’eau de Marne et l’eau de Seine. Chacune des deux usines dispose d’une capacité de production de
300 000 m3 par jour, pour une production moyenne de 130 000 m3.

Ces usines traitent l’eau en deux étapes :

Une clarification – Après un dégrillage et un tamisage de l’eau dite "brute", la clarification sur des bassins à l’air libre, permet de débarrasser l’eau de toutes les particules présentes, aussi petites soient-elles. À l’issue de cette étape, l’eau est propre mais non potable.

Un affinage – Dans un second temps, l’affinage se fait en milieu fermé pour préserver l’eau clarifiée de toute altération. Au cours de cette étape, l’ozone ajouté à l’eau permet de transformer les molécules non biodégradables en matière bio-dégradable et de tuer les micro-organismes dangereux pour l’homme. L’ozone est un désinfectant bactéricide, virucide. Puis l’eau est filtrée dans un bassin sur du charbon actif en grains –CAG. Le CAG retient les derniers micros polluants, capte les goûts et les odeurs.

Une désinfection supplémentaire aux ultraviolets placée en aval de la filtration sur charbon actif, permet de prémunir les consommateurs contre les risques sanitaires liés à la présence éventuelle de parasites, garantissant une eau potable.

De l’eau de Javel est ajoutée pour protéger l’eau pendant son transport de l’usine de traitement, en au robinet de l’usager passant par les réservoirs.

Joinville, au cœur du système d'alimentation de Paris

Première usine de traitement des eaux de rivière – Dès les années 1880, face à l’accroissement des besoins en eau des Parisiens, l’idée longtemps écartée de traiter les eaux de rivière est adoptée par le Conseil de Paris. C’est ainsi que l’usine dit de Saint-Maur à l’époque, jusque-là dédiée à l’alimentation des lacs et rivières du bois de Vincennes en eau de Marne, devient la première usine de traitement d’eau de rivière.

L’usine est mise en service en 1896 avec une capacité de production de 65 000 m3 par jour. L’usine est conçue selon le principe de la filtration lente, qui reproduit l’épuration naturelle par le sol grâce à des bassins filtrants remplis de sable de Loire. Dotée d’un laboratoire d’analyses et de recherche, l’usine expérimente de nouveaux traitements de désinfection, telle l’ozonation, mise en oeuvre dans la filière dès 1900. À l’issue de la première guerre mondiale, la filière de Saint-Maur est complétée par ajout d’eau de javel en fin de traitement pour préserver l’eau pendant son transport jusqu’au réservoir de Ménilmontant où elle est stockée avant d’être distribuée dans les arrondissements de l’est parisien.

1993-1998 une modernisation nécessaire – Sa filière a ainsi été complétée par un étage d’affinage de l’eau après clarification et par une étape préliminaire de flottation permettant de faire face aux crues algales de la Marne. La rénovation s’est effectuée autour de la filtration biologique lente : reproduisant le processus naturel de purification de l’eau, cette technique consiste à filtrer l’eau sur une couche épaisse de sable, à une très faible vitesse, éliminant les micropolluants et les micro-organismes pathogènes. La filtration lente est en effet un traitement souple, qui permet de varier les quantités d’eau à produire en fonction des besoins, mais aussi d’adapter son traitement aux pollutions de la ressource. Le choix d’une filière de traitement biologique permet d’économiser 90 % des produits chimiques qui seraient mis en oeuvre dans une filière physicochimique, dite à filtration rapide.

Désormais, le traitement est complété par une désinfection aux ultraviolets. Ainsi, l’eau est rendue potable sans que soit modifiée sa composition minéralogique.

Alimenter l’est parisien – L’usine de Joinville alimente l’est parisien à partir des réservoirs de Ménilmontant et des Lilas. L’eau est ainsi distribuée dans les 19e et 20e arrondissement et pour partie dans les 10e, 11e, 12e et 18e arrondissements. 

 

EAU DE PARIS
Depuis 20 ans, Eau de Paris assure l’alimentation en eau de la capitale à partir d’eaux souterraines captées dans les régions de Sens, Provins, Fontainebleau, Montreuil-sur-Eure et Verneuil-sur-Avre et d’eaux de rivière prélevée en Marne et en Seine avant d’être traitées.

Société d’économie mixte de la Ville de Paris, chargée de l’approvisionnement en eau de Paris,
Eau de Paris est devenue depuis le 1er mai dernier une régie municipale. Au 1er janvier 2010, elle deviendra l’opérateur public unique de l’eau à Paris, étant à la fois responsable de la production et de la distribution de l’eau à Paris. D’ores et déjà, elle a intégré une équipe de 55 salariés issus du CRECEP – Centre de recherche d'expertise et de controle des eaux de paris, afin de former un grand laboratoire d’analyses, d’études et de recherches.

Chiffres

3 usines de traitement d’eau de surface : Ivry, Orly et Joinville
102 zones de captage des eaux souterraines
470 km d’aqueducs
4 usines de traitement des eaux souterraines : Sorques, Longueville, Saint-Cloud et l’Hay-les-Roses
5 réservoirs principaux
Un Centre de commande et de contrôle de l’eau de Paris
Un Laboratoire d’Analyses, d’Études et de Recherches
Une équipe de 621 personnes

 

L’unité Seine-Marne – L’unité Seine-Marne regroupe l’ensemble des ouvrages implantés en Val-de-Marne, qui concourent à la production de l’eau de Paris. L’Unité s’est ainsi organisé en deux pôles : Ivry-Joinville et Orly-L’Haÿ-Les-Roses. Le premier pôle couvre l’alimentation en
eau de l’est parisien, le second, le sud et l’ouest. Une équipe 117 personnes assure
actuellement l’exploitation de ces installation, qui regroupent  4 usines de traitement d’eau potable : Ivry, Orly pour la potabilisation de l’eau de Seine ; Joinville pour la potabilisation de l’eau de Marne ; L’Haÿ-les-Roses pour la potabilisation des eaux souterraines captées dans la région de Sens et acheminées jusqu’à Paris par l’aqueduc de la Vanne ; plus le réservoir de l’Haÿ-les-Roses qui stocke les eaux produites par les usines d’Orly et de l’Hay-les-Roses.

Eau de Paris
Animation D'où vient l'eau de Paris