H2o Magazine

Eaux zodiacales

Mots clés : constellation, Cancer, Jupiter, Mars, Lune, Pluton, nadir, Neptune, Poisson, Scorpion, zénith, Zodiaque
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L'eau est, avec l'air, le feu et la terre, l'un des quatre éléments des grandes traditions antiques. Principe féminin en toutes choses, relié au bas, à l'hiver, au Nord, elle procède du froid et de l'humide. Salée, elle représente la gravité et la colère pour les Chinois, qui lui associent également la pluie, le millet jaune, le porc, la note musicale Yu, les reins et la couleur noire. Induisant la sensibilité et l'émotivité, elle détermine trois des douze signes de notre zodiaque, correspondant à trois constellations : le Cancer, le Scorpion et les Poissons.

Tous les pays et toutes les époques ont connu le Zodiaque et pratiqué l'astrologie dans les temples sacrés où étaient célébrés les mystères et les initiations. Cycle complet par excellence, divisé par le nombre parfait douze correspondant aux douze constellations et régi par sept planètes, le cercle du Zodiaque est une somme de symboles cosmiques physiologiques et psychologiques où chaque signe exprime une étape de l'évolution, qu'elle soit générale ou spécifique. Les trois signes d'eau caractérisent, à trois étapes différentes et à intervalles réguliers, l'influence essentielle de l'élément liquide, dans son interaction avec tout le cosmos, sur chacun de nos chemins, individuels ou universels, de l'origine à la transformation de toute vie.

portraits par Nicole MARI
h2o – juin 1999

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Le Cancer ou l'eau originelle

 

Quatrième signe du zodiaque (22 juin-22 juillet), le Cancer débute juste après le solstice d'été, quand, au milieu de l'année, les jours commencent à diminuer, le soleil, ayant atteint son zénith, amorce son déclin. Son hiéroglyphe composé de deux spirales évoque cette inversion du mouvement solaire, l'onde changeante, les vagues de la vie. Caractérisé par l'écrevisse ou le crabe, crustacé prudent, animal d'eau protégé de l'extérieur par une solide carapace, il figure un monde aquatique originel, celui du principe matriciel, maternel et nourricier, cette Grande Mère, refuge de l'humanité, d'où a surgi l'existence. Il symbolise les Eaux inférieures, dans lesquelles a été déposé l'Oeuf du Monde et au dessus desquelles se meut l'Esprit de Dieu. L'eau du Cancer est source de vie, une masse indifférenciée contenant le rituel, l'informel, tous les germes du monde manifesté, le creuset d'un imaginaire en souvenir ou en devenir, la création à l'état d'ébauche, un rêve en gestation. Aussi ce signe associé à la Lune porte-t-il en lui cette mémoire de l'eau originelle, sa psyché, son intimité, son intériorité, sa subjectivité, sa puissance créatrice et lyrique mais aussi sa fragilité, ses profondeurs, ses déchirures et ses gouffres. Il est synonyme, à la fois, de passivité, de timidité, de retrait sur soi, pour se garder des forces de l'ombre qui peu à peu envahiront la terre mais aussi de sensibilité de l'âme et du coeur, d'attachement aux valeurs et à la famille et de ténacité. Signe du milieu, de la médiumnité et de la médiation, il relie l'informel au formel, l'obscur au révélé. De l'eau de sa naissance, qu'il ne peut oublier, il a conservé, comme un cadeau unique dont il consent à payer le prix, un puits de savoir recélant le secret des résurrections futures. Au seuil de la réincarnation, son eau devient chemin, passage du zénith vers le nadir, de l'infini vers les profondeurs de la matière, de l'intellect à l'intuition. 

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Le Scorpion ou l'eau trouble des profondeurs

 

Huitième signe du zodiaque (23 octobre-21 novembre), le Scorpion naît au milieu de l'automne, lorsque l'été n'est plus qu'un souvenir jauni que le vent fait tomber des arbres et lorsque la nature dépouillée, les êtres et les choses se préparent à rentrer frileusement dans la nuit froide de l'hiver. C'est le retour au chaos de la matière brute et inerte, le sommeil glacé d'où jaillira la prochaine illumination et le renouveau du printemps. C'est le signe de l'entre-deux. Entre l'eau originelle de la source du Cancer et l'eau rendue de l'océan des Poissons, l'eau du Scorpion, profonde et silencieuse, sombre et redoutable, symbolise à la fois la stagnation, la macération, le pourrissement, la mort et la désagrégation. Eau noire, à la limite de la putréfaction, elle décompose toutes choses par ses fermentations organiques, désorganisant l'univers et ses créations, rongeant, par un instinct de destruction, le Grand Oeuvre de la vie. Arachnide dangereux, maléfique et fatal, qui vit caché dans l'eau stagnante ou la terre humide, fuyant la lumière, le scorpion ou scarabée est doté d'un dard empoisonné qu'il projette pour se défendre sur le monde extérieur ou se pique lui-même quand il se sent acculé. Il meurt ainsi ou s'endort seulement, le temps de laisser le danger s'écarter. Ce signe gouverné par le guerrier Mars et le ténébreux Pluton, évoque aussi la résistance, la dureté, le combat, les forces obscures et souterraines, la volonté de puissance et de domination. L'eau trouble des profondeurs de la terre et de l'être évoque un univers caché, souterrain, aux valeurs sombres et manipulatrices, aux instincts pervers et inquiétants. C'est le règne de l'eau croupissante, des pleurs, des drames et des tourments, de l'eau amère de l'angoisse de vivre, des cauchemars et des détresses, de l'eau effrayante des ténèbres, des ombres fantomatiques, des gouffres de l'enfer, de l'eau trouble des désirs inassouvis et des puissances mystérieuses et incontrôlées. Cette eau, qui assoiffe de vie sans désaltérer, dessine, dans les profondeurs de l'inconscient, une danse débridée où se mêle avec frénésie, la Création et la Destruction, la Mort et la Renaissance, la Damnation et la Rédemption. Centre de macération intense où se déchiffrent nos karmas répétitifs, elle porte cependant en elle la source de régénérescence. De cette eau noire, comme la lumière, jaillira la révélation d'une autre lumière intérieure et occulte. La trace d'un chemin initiatique, qui, en dehors des autoroutes convenues de la stérile Raison, sur les sentiers incertains de l'inexplicable et du non-dit, sensibilisera la conscience aux manifestations de l'intuition, ouvrira la porte à un monde interdit. L'eau ainsi purifiée et illuminée par sa propre lumière enfin redécouverte, transforme le scorpion infernal en scarabée sacré, image du soleil qui renaît de lui-même, de Dieu qui revient.

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Les Poissons ou l'eau de fécondité

 

Douzième et dernier signe du Zodiaque (19 février-20 mars), les Poissons émergent juste avant l'équinoxe de printemps, quand l'eau des pluies diluviennes et des crues hivernales prépare la terre à la grande fête du Renouveau. Ils sont par excellence, l'emblème de l'élément eau dans lequel ils vivent. Symboles de fécondité et de sagesse, ils restent cachés, silencieux, dans les profondeurs de la mer dont la force sacrée les pénètre. Dormant dans les lacs ou voyageant à travers les rivières et les fleuves, ils donnent la pluie, l'humidité, l'inondation et déterminent ainsi la fertilité de la terre. Préfigurant les Eaux supérieures et le Monde intérieur, ils illustrent le passage de la particularité à l'indifférence initiale. L'eau des Poissons dissout et engloutit dans un déluge rédempteur et compose la masse informe et anonyme de l'immense Océan où tout finit par s'écouler. Elle diffuse, dilue, enveloppe, fusionne et purifie. Elle est eau indistincte, indifférenciée, confuse et infinie, principe d'amplification, de dissolution et d'intégration universelles. Elle est marée du grand Univers, à qui appartient et où participe, comme la goutte d'eau agrégée à l'océan, la communauté de tous les Hommes de la terre. Caractérisé par deux poissons accolés en sens inverse et dont les bouches sont reliés par un cordon, ce signe dominé par le maître Jupiter et le puissant Neptune évoque le psychisme, un univers intime, secret en communication avec la Divinité, le réceptif et le sensible mais aussi l'inconsistance, la perméabilité, l'impressionnabilité et l'émotivité débordante. Associée à la naissance et à la restauration cyclique, ensemencée par les sécrétions intimes de ces habitants, l'eau accueille à sa surface la manifestation du sacré. De cette eau angoissante où tout se confond et se mélange, où se noient les égoïsmes et les individualités, où s'effacent les particularismes et les différences, où l'esprit se dédouble, se cherche, se perd pour mieux se retrouver, va jaillir l'idée du Sauveur et l'instrument de la Révélation. Le poisson devient nourriture spirituelle, aliment du repas eucharistique et image du Christ vivant. L'eau transcendantale et lustrale montre à l'être humain la manière dont il doit se conduire. Débordant de lui-même, oubliant les limites étroites de son existence personnelle et ses petites préoccupations quotidiennes, l'Homme-poisson, ouvrant son coeur au monde qui l'entoure, appréhende, du fond d'une conscience uniforme et multiple, une valeur qui le dépasse et lui montre la voie d'une vérité universelle où s'inscrivent les fils de sa Destinée. De l'ère des Poissons qui s'achève, va éclore le "Nouvel âge", l'âge d'or d'une humanité réconciliée. .